2019 va être une année importante en Afrique du Sud. Des élections présidentielles viendront montrer si le pays comme une bonne partie du monde aura décidé de plonger dans le populisme, voire même de renier le message de son père fondateur. Ce sera aussi l’année où le président actuel, attendu comme le messie après le concours de bêtises remporté haut la main par le précédent, l’année où il devra être accompagné par une conjoncture favorable. 2019 sera aussi l’année où les grands sujets, enfin, devront trouver leur réponse. S’ils ne la trouvent pas, les extrémismes se chargeront d’apporter la réponse aux grandes questions qui secouent l’Afrique du Sud et son peuple… quelque soit sa couleur. Voici ces quelques sujets :
Une économie en panne :
L’Afrique du Sud est officiellement en récession ; voici qui ne fait pas très joli sur la carte de visite. Et pourtant cette récession est bien réelle ; si elle est surtout liée à l’activité agricole plus qu’au reste de l’économie, le message n’est pas très attirant. Et pourtant, le continent africain continue par endroit de connaître des taux de croissance assez importants. Parfois soutenus par une activité pétrolière florissante (Nigeria, Gabon), parfois par une économie qui a compris les bienfaits du dumping social (Ethiopie) et parfois aussi parce que l’économie se structure profondément comme au Ghana, en Côte d’Ivoire, au Kenya ou au Rwanda… le bon élève économique du continent. Ce n’est pas par hasard si les producteurs hollywoodiens ont choisi ce pays (enfin la région) pour situer le désormais mythique Wakanda. L’Afrique du Sud, dans toutes les études, arrive après le Nigeria (qui entre nous soit dit est à des années lumières) ou l’Egypte. Concrètement, cette récession mécanique donc finalement tout de même très réelle a eu pour effet de faire chuter le rand (la monnaie locale). Cette aubaine pour le voyageur en 2019 est une peine très lourde pour les sud africains ; le pétrole augmente et à cette augmentation s’ajoute la baisse du rand… du coup toute l’économie est touchée. Pas joyeux…
La redistribution des terres :
Cela a fait grand bruit lorsque ce sujet, longtemps laissé sous la table, est revenu à l’ordre du jour. S’il est bien un sujet que Mandela n’a pas traité, c’est bien celui-ci. Et d’une certaine façon, il avait raison ; mais la situation n’a que trop duré. Au début, cette redistribution a été tellement allégée qu’elle avait plus l’air d’un slogan qu’un réel changement. Mais les forces extrémistes poussant au portillon (le fameux Julius Malema), le pouvoir a dû durcir sa position et la solution envisagée semble aujourd’hui devenir plus ferme… plus autoritaire, donc moins acceptable aux yeux du monde « blanc » qui a horreur que l’histoire se retourne contre lui. Il n’en reste pas moins que le problème est plus profond et la solution pas si évidente que cela. Aujourd’hui l’argent est dans des poches noires et blanches… les poches noires pourraient investir dans le patrimoine mais il n’en est rien. Pendant ce temps, les poches blanches restent bien remplies, elles tremblent mais demeurent bien remplies. Leurs liquidités quittent le pays, les terres, elles, restent… mais sans argent, sans investissement, comment faire ? et comment investir des capitaux avec la perspective qu’un des droits les plus sacrés du capitalisme, la propriété, ne soit pas respecté. Les chinois se posent moins de questions et dans ce jeu de l’épouvantail, comme partout en Afrique, la Chine avance, tranquillement, sans scrupule et se constitue un patrimoine qui n’est alors ni noir ni blanc… match nul.
La sécurité :
J’entends les inquiétudes ; je les entends depuis plus de 20 ans mais je les prends bizarrement plus au sérieux quand elles me viennent de personnes qui étaient les plus fervents défenseurs du pays, destructeurs des idées reçues ; je les vois aujourd’hui inquiets, envisageant le pire, comme à chaque fois que l’Afrique du Sud a connu un changement. La sécurité est un sujet permanent surtout dans les grandes villes, surtout pour les locaux (touristes n’ayez crainte) et surtout, il faut le dire, dans les quartiers les plus pauvres. La sécurité est un des autres piliers qui permet le développement. Par endroit, le niveau est devenu tel que la police n’y peut plus rien, souvent minée par une corruption qui l’occupe plus à flasher les belles voitures pour arrondir ses fins de mois qu’à courser les criminels opportunistes. Mais il sera impossible avec un passé tel que celui de l’apartheid d’avoir une gestion volontariste donc forte pour maintenir la sécurité. Alors, que faire ? Là aussi, je n’ai pas la solution.
Quelles sont alors les raisons d’espérer ? il en existe des tas ; une population qui travaille, dont le niveau d’éducation n’a jamais été aussi haut (j’ai souvent l’impression que tout le monde est en train d’étudier, de faire un MBA, master ou autre diplôme) ; le pays a des infrastructures fabuleuses, certes vieillissantes mais tout de même qu’on ne compare pas l’Afrique du Sud à ceux qui en $ sont riches mais se dandinent dans des pays misérables et encore plus injustes et pauvres… sans parler du niveau de démocratie. Il existe aussi beaucoup d’énergie ; perdez vous à Joburg, au Cap, dans les fermes éclairées, les lodges, certaines petites villes… partout on travaille, on avance, quelque soit sa couleur… Le Cap, après le fiasco du Day 0 (le jour où le Cap n’aurait plus d’eau communiqué en janvier dernier), n’a jamais été aussi attractive et belle. Alors, oui, il reste des problèmes, beaucoup, et pas simples. Mais l’Afrique du Sud demeure un joyau qui attend juste que son peuple le fasse briller. Un jour viendra où il y arrivera. En 2019, ce sera une année charnière où le choix devra être fait entre la lumière et l’obscurité… je parie pour la lumière… il ne peut en être autrement au pays de Mandela.
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