Les Springboks parlent à l’Afrique du Sud…

L’Afrique du Sud s’est octroyée brillamment une troisième étoile de champion du monde de Rugby le samedi 2 novembre 2019… L’occasion de revenir sur le message et l’espoir qu’apporte cette victoire en s’inspirant de ce qu’elle entraîna en 1995 lors de sa première victoire.

A midi, ce samedi 2 novembre, les Springboks, nom symbolique de l’équipe de rugby sud africaine, décrié en 1995 puis conservé à la demande express de Nelson Mandela alors président, ont gagné contre toute attente, leur troisième coupe du monde, avec fulgurance et brio au Japon contre l’Angleterre. Ce match était un affrontement entre bien des mondes différents. Non que l’Angleterre en plein doute brexitien n’ait pas l’envie (ou le besoin) d’une victoire, l’Afrique du Sud en avait désespérément besoin.

Les symboles sont forts; hémisphère Sud contre le Nord, ancien monde contre le nouveau, ancienne puissance coloniale contre nouvelle puissance émergente… la réalité, c’est que c’était un simple match de rugby avec deux équipes de 15 joueurs. Mais les sud africains voulaient désespérément revivre l’ivresse de la victoire pour ce sport si important dans ce pays. L’ivresse qu’ils avaient vécue en 1995, quand Nelson Mandela, premier président élu démocratiquement souleva avec son équipe la première coupe du monde gagnée… et sur ses terres… Le film Invictus revint sur cette aventure où le sport, comme souvent, est un prétexte à l’expression du monde contemporain, ses luttes et ses victoires.

Ce samedi 2 novembre 2019, c’est une Afrique du Sud meurtrie et encore traumatisée par les émeutes xénophobes de septembre, qui s’est réunie autour d’une bière, d’un shebeen ou d’un écran géant pour espérer. C’est une Afrique du Sud dont l’opinion des villes et celles des campagnes est en train de s’éloigner au risque de renier son héritage et la beauté de son destin. C’est une Afrique du Sud, qui panse la honte de son président déchu, Zuma en espérant que le nouveau, Ramaphosa, sera enfin à la hauteur. C’est une Afrique du Sud en improbable récession alors même qu’elle recèle tellement de richesses humaines et minérales.

Ce 2 novembre 2019 à midi, l’Afrique du Sud a montré au monde ce qu’elle ne montrait plus depuis longtemps, un visage d’unité. Et ces mots du capitaine des Springboks, Siya Kolisi, résonnent comme ceux d’un peuple qui veut se dépasser comme il a dépassé il y a 25 ans, ses divisions, la haine, la violence, pour s’accorder autour de la réconciliation:

« Le peuple sud africain s’est rangé derrière nous. Nous sommes tellement reconnaissant envers lui. Notre pays a tellement de problèmes… Mais le fait d’avoir une telle équipe qui le représente, avec des individualités venant de tellement d’univers différents, de couleurs différentes, qui se sont unies derrière un seul objectif… et nous voulions tous, sans exception, y parvenir. J’espère sincèrement que ce que nous avons accompli apportera le bien en Afrique du Sud… Nous sommes venus pour accomplir quelque chose … peuple sud africain, qui nous avez soutenu depuis les bars, les shebeens, les fermes, la rue ou les régions rurales, nous vous remercions.  » et de conclure:  » We love you, South Africa, and we can achieve anything if we work together as one ».

Samedi 2 novembre à midi, la nation arc en ciel était représentée depuis le bout du monde japonais par 15 hommes, humbles et heureux qui voulaient montrer au monde mais avant tout à leur propre pays dans toute sa diversité et ses contrastes, combien ce qui oppose chacun et au contraire une force et ce qui peut permettre à ce pays d’espérer atteindre et demeurer sur le toit du monde ou au moins de son continent.

Ne surestimons pas l’impact bien éphémère d’une victoire sportive… mais il n’est pas inutile de se vautrer avec plaisir dans l’espoir si rare qui resurgit à de si belles et rares occasions.

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